2.2.3 Propriétés de l’application fréquence numérique

L’étude des propriétés de l’application F T  va nous donner des informations sur le système dynamique (résonances, nonlinéarités, chaos).

  1. L’image F T(τ,I)
  θ0  est indépendante du choix dans angles initiaux θ0  (cf. sur un tore, les fréquences ne dépendent pas de la phase) et F T  est une fonction régulière pour une trajectoire KAM. Inversement, la non-régularité de   T
F  (τ,I)  nous permettra de mettre en évidence les phénomènes résonants et les zones chaotiques.
  2. La convergence de la méthode est rapide et suit une loi en 1-
T4   en utilisant une fenêtre de Hanning alors qu’une transformée de Fourier rapide (FFT) converge en 1
T-  (Laskar, 1999). En effet, l’algorithme de la FFT présuppose que le signal recherché est périodique, alors que l’Analyse en Fréquence cherche à reconstruire une plus grande classe de signaux, à savoir les signaux quasi-périodiques de la forme (2.69) ; ce point fondamental rend la méthode plus apte à l’étude d’un système dynamique. Cette propriété permet de la calculer sur un temps d’intégration T  court et de faire de la prédiction à long terme.
  3. L’application F Tθ0   est invariante par translation dans le temps τ  pour une trajectoire régulière (trajectoire KAM). A l’inverse, la variation avec le temps des fréquences, appelée diffusion, pourra être utilisée comme indice de stabilité et de chaoticité de la trajectoire.

    La diffusion des orbites nous donnera de précieuses informations sur la stabilité globale de la dynamique du système étudié. Pour un système à deux degrés de liberté, l’espace des phases est de dimension 4, les surfaces d’énergie de dimension 3 et l’espace des fréquences de dimension 1 (cf. réduction par la conservation de l’énergie). Une orbite KAM est représentée par un point dans l’espace des fréquences et vit sur un tore de dimension 2. Une orbite non régulière n’est pas un point mais une courbe révélant la diffusion entre les orbites régulières (cf. Fig. 2.11-a). Il est clair que dans l’espace des fréquences, un point (dimension 0) sur une courbe de dimension 1 empêche tout mouvement régulier d’avoir de grandes excursions en amplitude. De manière équivalente, en se plaçant dans l’espace des phases, un tore de dimension 2 sépare une surface d’énergie (dimension 3) en une partie intérieure et une partie extérieure : c’est donc une barrière topologique à la diffusion.

    Pour un système à trois degrés de liberté, la situation n’est plus du tout la même. Un point n’arrête pas la diffusion dans un plan (cf. Fig. 2.11-b). Vus dans l’espace des phases, les tores de dimension 3 ne sont plus des frontières topologiques à la diffusion pour une surface d’énergie de dimension 5. Cependant il peut être montré que la diffusion est quasi-nulle au voisinage des orbites régulières. Au voisinage d’une trajectoire KAM, la diffusion décroît exponentiellement si bien qu’un grand nombre de trajectoires régulières joue le rôle de barrière effective à la diffusion (résultat de Morbidelli et Gorgilli, 1995).


pict

FIG. 2.11: Diffusion pour un système à deux degrés de liberté (a), e.g. l’application d’Hénon (cf. infra) : la diffusion est confinée par les trajectoires régulières qui sont des points dans l’espace des fréquences. Pour trois degrés de liberté (b), e.g. la dynamique transverse d’un accélérateur, la diffusion n’est plus confinée par les trajectoires régulières ; la diffusion est cependant faible en leur voisinage (Laskar, 1994)