3.2.3 Choix du logiciel de tracking

Pour effectuer cette étude, plusieurs logiciels pouvaient être utilisés13 :

Le programme DESPOT a dû être abandonné dès le début pour cette étude, car il ne modélise pas les champs de fuite d’un dipôle : tout le code est écrit dans l’approximation des grandes machines.

Le programme BETA a l’inconvénient d’être lourdement interfacé et interactif, rendant son utilisation difficile pour des calculs longs tels ceux d’une carte en fréquence. Cependant étant utilisé au LURE, dans un premier temps, il n’a pas été écarté.

3.2.3.1 Symplecticité et champ de fuite avec le code BETA

L’ensemble de la discussion va porter sur une description de Super-ACO sans défaut, i.e. pour une machine idéale.

Lorsque les champs de fuite sont inclus dans le modèle de la dynamique, les calculs effectués avec le code BETA à l’ordre 2 ne sont plus symplectiques. En fait, leur inclusion dans le développement de Taylor d’ordre 2 « tue » la symplecticité de l’intégrateur (cf. Fig. 3.15). Si l’on appelle ℳ l’application de transfert et M  sa matrice jacobienne, alors par définition la transformation est symplectique si et seulement si (Goldstein, 1980) :

                           ( O3    I3)
tMSM   =  S    avec     S =
                             − I3 O3

avec I3   et O3   respectivement les matrices identité et nulle de rang 3. Ces conditions de symplecticité se traduisent par 15 relations pour un système à 3 degrés de liberté. Dans le logiciel BETA, la matrice de transfert prend en compte les termes du second ordre. Ainsi programmé, le nombre de relations de symplecticité est plus élevé (quelques conditions devant être théoriquement nulles, si le schéma d’intégration est symplectique, sont données par le tableau 3.4). Il ne faut donc pas utiliser BETA au second ordre pour Super-ACO mais utiliser l’ordre dit scaling14 qui prend correctement en compte les champs de fuite.







Avec champs de fuite
Conditions de symplecticité





1.07E-09 -9.41E-09 3.72E-08 3.27E-04 6.04E-03
6.04E-03 -1.24E-02 1.77E-02 -2.80E-01 4.79E-04
1.77E-02 -3.55E-14 -1.07E-13 1.56E-13





Sans champ de fuite
Conditions de symplecticité





1.07E-09 -9.41E-09 3.72E-08 4.44E-16 -5.84E-14
-1.46E-13 -1.42E-12 -2.61E-13 1.58E-11 -5.33E-15
6.39E-14 -8.70E-14 -3.23E-13 1.58E-13






TAB. 3.4: Variations des conditions de symplecticité avec et sans champ de fuite dans les dipôles de Super-ACO (calculs avec le code BETA). Normalement, toutes ces conditions devraient être proche d’un zéro numérique.


pict

FIG. 3.15: Un exemple de non symplecticité : une particule test de conditions initiales x=3
0  cm et x′=  0
 0  est intégrée sur 5 000 tours au second l’ordre avec le code BETA. Normalement, la trajectoire des phases devrait être une ellipse passant par la condition initiale (le système est dans ce cas à un degré de liberté). On observe au contraire une trajectoire spirale vers le centre de l’espace des phases (x,x’) comme en présence d’un terme d’amortissement. Les points de la trajectoire ne sont pas reliés par soucis de lisibilité.


3.2.3.2 Symplecticité et faible rayon de courbure

Si les champs de fuite des dipôles sont négligés, au second ordre, le système intégré reste symplectique (comme on l’attend), mais uniquement à très faible amplitude (e.g. x0 = 1   mm). Par contre dès x0 > 5   mm, l’espace des phases se peuple de trajectoires spirales caractéristiques ici encore de la non-symplecticité. Après quelques discussions fructueuses avec J. Payet, il s’avère que la seconde raison de non-symplecticité est le faible rayon de courbure de Super-ACO, ρ=1.7
c   m. Notons cependant que ce problème est général pour pratiquement tous les logiciels de tracking — second ordre de MAD compris — car l’approximation des grands rayons de courbure, abusivement utilisée, est souvent oubliée.

La conclusion est l’obligation d’utiliser le code BETA à l’ordre scaling pour tous les calculs de Super-ACO.

3.2.3.3 Notes sur l’ordre scaling de BETA

Une fois ces premiers problèmes cernés, une comparaison des résultats obtenus avec les logiciels BETA et MAD a été réalisée. Rappelons que parmi les critères recherchés, la rapidité de calcul et la validité du code à grandes amplitudes sur un grand nombre de tours sont primordiales pour utiliser l’Analyse en Fréquence.

La figure 3.16 illustre un bogue lors du calcul de la contribution des multipôles dans BETA. Alors qu’à l’ordre scaling, les résultats devraient être strictement identiques en mode15 XZ ou QXZ, ils sont totalement dissemblables, en particulier pour la variation du nombre d’ondes horizontal avec l’amplitude. Après discussion avec J. Payet, il s’avère que les calculs doivent être réalisés en mode XZ (plus lent que le mode QXZ mais « moins imprécis » !).


pict pict

FIG. 3.16: Comparaison des glissements des nombres d’ondes calculés à l’ordre scaling en mode QXZ, XZ de BETA et avec l’intégrateur LIE4 de MAD sur 1 000 tours de Super-ACO. Les calculs des décapôles ne sont pas corrects à grandes amplitudes (x >  20   mm) avec le code BETA (cf. faible rayon de courbure de l’anneau).


Ajoutons enfin, que l’ordre scaling est une approximation qui est valide seulement à faible amplitude. En comparant les résultats entre BETA et MAD, il s’avère que les résultats diffèrent dès x=±20   mm16, amplitude relativement faible puisque l’acceptance physique de la machine est + 60   mm ! Au-delà, les résultats de BETA sont complètement faux, car les approximations de calcul ne sont plus vérifiées.

Dans la suite, sauf cas explicitement dit, je n’utilise plus que l’intégrateur LIE4 de MAD qui est assez lent mais « exact » à grande amplitude car symplectique d’ordre quatre.

Pour finir, remarquons qu’on n’observe pas de différence notable pour le calcul de νy = f (y )  avec BETA mode QXZ, XZ ou LIE4 de MAD. Ce résultat se comprend immédiatement, car les lentilles décapolaires induisent le champ magnétique suivant :

{
  Bx   = b5(x4 + y4 − 6x2y2)
              3        3
  By   = b5(4x y − 4xy  )
(3.1)

b
5 est la force octupolaire (cf. l’expression générale 1.46 du champ magnétique, p. §). Or les calculs précédents ont été réalisés pour x = 0  ou y = 0  (couplage non pris en compte dans ce type de calcul par le code BETA) ; les champs magnétiques se simplifient dans le premier cas à (Bx,By)= b5(y4,0)  et dans le second cas à (Bx, By) = b5(x4,0)  . Donc, il n’y a pas d’influence notable dans le plan vertical.

Malgré ses qualités, le code BETA n’est pas adapté pour effectuer de longues intégrations numériques et des optimisations à grandes amplitudes (pour une machine à faible rayon de courbure). D’ailleurs, il n’a pas été écrit dans cette optique (cf. les approximations réalisées).