Au cours de ce chapitre, je présenterai les deux outils fondamentaux utilisés durant ma thèse. Un code numérique d’intégration des équations du mouvement, en application directe du formalisme hamiltonien présenté précédemment, et l’Analyse en Fréquence.
Dans une première partie, je discuterai d’abord des motivations qui m’ont conduit à me lancer dans l’écriture d’un code numérique. Ensuite, je donnerai une brève description des différentes philosophies et méthodes employées et expliquerai leurs domaines de validité. Je m’attarderai plus particulièrement sur l’avantage des nouvelles méthodes (schéma symplectique, algèbre de Lie) utilisées dans le monde des accélérateurs. Bien que ces méthodes soient aujourd’hui très répandues aux Etats-Unis, elles ont plus de mal à s’établir en Europe1. Je présenterai alors une nouvelle classe d’intégrateurs symplectiques à pas tous positifs développée par Jacques Laskar (2000). Puis, je l’appliquerai aux Hamiltoniens décrivant chacun des principaux éléments magnétiques d’un accélérateur. Enfin, je donnerai une comparaison avec l’intégrateur de Ruth (1983), intégrateur symplectique le plus utilisé pour les machines à électrons.
Après avoir intégré les équations du mouvement, la dynamique des différentes machines à rayonnement synchrotron sera étudiée au moyen de l’Analyse en Fréquence. L’Analyse en Fréquence est l’outil central de mon travail de thèse. Je commencerai, dans la seconde partie de ce chapitre, par décrire la méthode sans noyer le lecteur dans des détails trop techniques. C’est un outil extrêmement puissant qui a été développé par Jacques Laskar initialement pour étudier la dynamique du Système Solaire. Avant de l’appliquer à la dynamique des accélérateurs (voir le chapitre 3), je présenterai quelques résultats pédagogiques sur le pendule rigide et l’application d’Hénon. Ces deux applications à un et deux degrés de liberté auront la particularité de permettre au lecteur de pouvoir lire plus simplement les cartes en fréquence des accélérateurs ; de plus, ils me permettront de présenter brièvement quelques résultats généraux sur les résonances et la stabilité des systèmes dynamiques.
L’écriture d’un code d’intégration des équations du mouvement est arrivée tardivement dans mon travail de thèse. Dans le langage accélérateur, on parle souvent de code de tracking. De multiples raisons expliquent ce choix :
Pour commencer, de nombreux codes de tracking avaient déjà été écrits. Par exemple le programme MAD développé continuellement au CERN [50] est largement employé par la communauté des physiciens des accélérateurs. Cependant, généralement à chaque accélérateur correspond un ou plusieurs codes spécifiques. Ces codes sont modifiés, améliorés constamment et localement pour permettre de prendre en compte de nouveaux phénomènes physiques, de nouveaux éléments magnétiques. Très rapidement, le résultat peut être un code volumineux qui, souvent, est adapté à des tâches diverses et variées, allant de la conception d’un accélérateur à l’optimisation de sa dynamique et de ses performances. Le groupe théorie faisceau d’une machine peut être divisé schématiquement en deux sous-groupes : une personne spécialiste et développeur des codes utilisés par les membres du second groupe.
J’ai découvert le monde des accélérateurs au sein de l’équipe du Projet SOLEIL, il y a bientôt trois ans. Lorsque j’ai commencé à étudier la dynamique de SOLEIL, on m’a donné une description de la maille théorique de l’anneau de stockage et le manuel d’utilisation du logiciel BETA [93] pour faire le tracking. Le même processus s’est répété pour l’étude de l’Advanced Light Source avec le code DESPOT [42] (ici il n’y a pas de manuel d’utilisation).
Donc dans un premier temps, les codes d’intégrations se sont résumés à des boîtes noires « censées » donner les bons résultats. De plus, l’écriture d’un code de tracking est considérée comme une tache ardue par les utilisateurs. Mon directeur de thèse, astronome, prétendait le contraire après avoir travaillé avec les physiciens de l’ALS (1993). Initialement, je ne l’ai pas crû. Puis, en travaillant sur différentes sources de lumières (cf. chapitre 3), j’ai dû presque utiliser un code de tracking différent par machine. J’ai été confronté à des problèmes de modélisation, à des incompatibilités entre codes. Plus préoccupant, les codes peuvent donner des résultats complètement différents aux grandes amplitudes du mouvement et parfois même pour les paramètres linéaires. Le temps de calcul peut également être du simple au double suivant les méthodes utilisées.
Enfin, à ces motivations doivent encore s’en ajouter deux autres. Premièrement à ma connaissance, il n’existe pas dans la communauté française2 de code de tracking optimisé et adapté à l’étude de la dynamique à long terme des accélérateurs d’électrons. Deuxièmement, l’équipe Astronomie et Systèmes Dynamiques est un lieu regroupant toutes les compétences nécessaires pour l’écriture d’un tel intégrateur. Ces dernières années, plusieurs intégrateurs y ont d’ailleurs été développés pour la Mécanique Céleste.
Le but principal de ce travail est donc d’obtenir un code de calcul efficace permettant d’intégrer le mouvement d’une particule dans un élément magnétique puis dans l’accélérateur complet. L’intégrateur doit être à la fois rapide pour réaliser des études à long terme (plusieurs millions de tours), précis pour étudier finement la dynamique et valide à grande amplitude pour prendre correctement en compte l’effet des éléments multipolaires. Dans la première version du code, la modélisation des défauts (déplacements, rotations des éléments magnétiques) ne nous intéresse pas ; cependant leur implémentation ne poserait aucune difficulté.
Je vais commencer par décrire les deux grandes approches selon lesquelles les codes numériques de tracking sont écrits. Mais tout d’abord, définissons les notions d’information locale et globale dans un accélérateur (cf. Forest et Hirata, 1992 et Forest, 1998).
Une quantité est appelée locale si elle dérive d’un élément magnétique indépendamment de sa position dans l’anneau et de l’anneau lui-même : intégration d’une particule à travers l’élément, le système de coordonnées de référence, la déviation de l’orbite nominale, le champ magnétique ou l’enveloppe du faisceau.
Une quantité est dite globale si elle ne peut être déduite qu’à partir de la connaissance de l’anneau complet : l’orbite fermée, les nombres d’ondes, les fonctions de Twiss ou l’émittance d’équilibre.
Dans l’ancienne approche, on définit un seul et unique système de référence (coordonnées curvilignes), le champ électromagnétique est alors développé dans ce système pour obtenir l’expression, soit d’un Hamiltonien global, soit d’équations newtoniennes globales. Les équations du mouvement sont exprimées de manière à permettre simultanément le tracking et le calcul des quantités globales caractérisant l’anneau. Bien que possible, cette approche devient très compliquée avec l’augmentation de la complexité et de la taille d’un anneau de stockage.
Les solutions () du mouvement sont obtenues en effectuant un développement de Taylor des
équations du mouvement autour d’une orbite dite de référence — typiquement l’orbite fermée qui
doit préalablement avoir été calculée — ; cependant son obtention est pénible à partir
de l’ordre 3. L’expression générale entre le vecteur position initial (
) et final (
)
s’écrit :
![]() | (2.1) |
où représente l’orbite fermée,
l’optique linéaire,
, les aberrations optiques
d’ordre un et deux (voir Brown, 1982). L’optique linéaire est obtenue en tronquant la série de
Taylor au premier ordre. Les éléments magnétiques sont modélisés par des matrices, puis selon les
besoins, on inclut les termes d’ordres supérieurs. Généralement, le développement est arrêté au
second ordre pour permettre d’inclure les éléments multipolaires qui sont presque toujours exprimés
sous forme de lentilles minces, en particulier les inévitables hexapôles (voir par exemple les logiciels
BETA [93], TRANSPORT [50]).
Cette approche est historiquement la première a avoir été développée (Courant et Snyder, 1958 et Bruck, 1966). Initialement, elle été vouée à la conception des accélérateurs, au tracking sur quelques tours, afin de calculer les grandeurs linéaires et d’analyser la stabilité du mouvement au premier ordre. Une des hypothèses fondamentales utilisées est l’approximation des petits angles ou approximation dite des grandes machines, hypothèse qui rend les dipôles et quadripôles linéaires (et les sections droites : « éléments sans champ »).
Cette méthode a l’avantage de permettre d’obtenir simplement et rapidement les informations globales de l’anneau (e.g. fonctions de dispersion, orbite fermée, nombres d’ondes, chromaticités, fonctions de Twiss). Autre avantage, le temps de calcul de l’ouverture dynamique (paramètre essentiel pour l’optimisation) est suffisamment faible (quelques minutes) pour permettre de tester un grand nombre d’optiques de la machine3.
Je voudrais insister sur le fait qu’il n’existe pas de logiciel de calcul adapté à tous les besoins rencontrés dans le monde des accélérateurs : chaque code de calcul est écrit dans un cadre très précis (développement au voisinage de l’orbite fermée, approximation des grandes machines, conception de machines, optimisation d’optiques), cadre qui trop souvent est oublié par leurs utilisateurs. De plus, il faut ajouter que les performances exigées aujourd’hui pour les accélérateurs ne sont plus du tout les mêmes qu’il y a vingt ou trente ans. A l’époque, les machines étaient très linéaires, avaient de faibles acceptances en énergie et dynamique ; aujourd’hui, pour une machine comme SOLEIL, on exige des performances extrêmes — acceptance en énergie de six pour cent, grande ouverture dynamique, durée de vie de plus de dix heures, haute brillance, faible émittance, nombreux dispositifs d’insertion — et tout cela avec des composantes multipolaires de plus en plus fortes, rendant l’optimisation de plus en plus délicate du fait des nombreuses résonances induites.
Après cette parenthèse, nous convenons qu’il serait dangereux d’utiliser un code hors de son cadre. En particulier, si l’utilisation d’un développement de Taylor est adapté pour les LINAC (que la particule ne traverse qu’une seule fois), il serait illusoire de vouloir utiliser aujourd’hui cette approche pour une étude fine de la dynamique et pour des études à long terme, et qui plus est, à grande amplitude (cf. infra Super-ACO, une machine à faible rayon de courbure). De par la non symplecticité de la troncature de la série de Taylor (en général), lorsque la trajectoire d’une particule est intégrée sur plusieurs milliers de tours pour des électrons ou plusieurs dizaines de millions de tours pour des protons, on observe des amortissements artificiels conduisant à des orbites spirales et à la présence de résonances factices.
La méthode dite moderne consiste à découpler la simulation de l’analyse, i.e. séparer la construction de l’application de premier retour et de l’intégrateur (problèmes locaux) de l’analyse des grandeurs caractéristiques déduites de l’application de premier retour (problèmes globaux) ; cette séparation doit avoir lieu autant du point de vue de la conception que du point de vue de la programmation.
La construction d’un code de tracking est un problème entièrement local : chaque élément est défini par un Hamiltonien local dont le système de référence est choisi à partir de considérations purement géométriques (formes et symétries du champ magnétique). Suivant le type d’élément magnétique telles ou telles considérations seront privilégiées, considérations qui peuvent être contradictoires d’un élément à l’autre. Il faut donc trouver une méthode pour relier les éléments les uns avec les autres : c’est l’approche LEGO si l’on reprend la terminologie de Forest et Hirata (1992). Comme nous l’avons déjà dit, le choix du système de coordonnées est entièrement libre ; cependant deux grandes familles de blocs sont à distinguer : le bloc courbe et le bloc rectiligne.
|
Le but des blocs de base est de permettre de construire et calculer l’application qui transporte une
particule de la face d’entrée (i) à la face de sortie (f) ; cette application, , est généralement
appelée application de transfert ou flot de l’élément :
![]() | (2.2) |
Remarquons qu’un élément magnétique pourra être composé de plusieurs blocs élémentaires. L’élément physique sera donc défini par le couple bloc (rectiligne, courbe) et un modèle qui donne l’application de transfert à travers l’élément.
Donnons dès à présent, deux propriétés essentielles du flot. Soit deux éléments notés (1) et (2),
et est le flot associé à (1) et
celui associé à (2) alors le flot résultant pour le
système (1–2) est simplement l’application composée :
![]() | (2.3) |
Pour un système autonome qui possède une périodicité (l’anneau), on est amené à calculer le flot
de l’anneau complet sur
tours de circonférence
, alors :
![]() | (2.4) |
Cette approche est bien locale, chaque élément est modélisé par un Hamiltonien exprimé dans les coordonnées naturelles (pour son intégration).
Nous allons introduire quelques notions d’algèbre de Lie et définir l’intégration symplectique (voir Lectures on nonlinear orbit dynamics de A. Dragt (1982) pour une introduction à l’algèbre de Lie appliquée au monde des accélérateurs).
Soit le Hamiltonien d’un système autonome à
degrés de liberté et
le
vecteur de coordonnées et moments généralisés et
, la coordonnée indépendante. Alors les
équations de Hamilton sont :
![]() | (2.5) |
Si on définit les crochets de Poisson de deux fonctions f et g des variables par :
![]() | (2.6) |
alors les équations 2.5 peuvent se réécrirent de manière plus concise :
![]() | (2.7) |
avec l’opérateur différentiel défini par
. On peut alors intégrer formellement
les équations du mouvement pour des conditions initiales données
:
![]() | (2.8) |
En pratique, la difficulté est l’évaluation du terme de l’équation 2.8, car bien qu’étant une
série convergente, la convergence est souvent lente et nécessite l’évaluation d’un grand nombre
de termes dépendant du pas de temps
et de la forme de
. Le principe de base
utilisé pour intégrer l’équation 2.7 consiste à approximer l’opérateur
de manière
symplectique.
Formellement, la solution exacte du système 2.8 est symplectique : le flot hamiltonien,
transportant le vecteur de l’espace des phases du temps
au temps
le
long d’une trajectoire du système d’énergie
, conserve exactement la 2-forme
symplectique4 :
![]() | (2.9) |
Une méthode d’intégration vérifiant cette propriété est appelée intégrateur symplectique. Un
développement de Taylor à l’ordre ne vérifie généralement ni la condition de symplecticité 2.9 ni
la conservation de l’énergie. Remarquons qu’idéalement, on souhaiterait également que l’énergie soit
exactement conservée, cependant Ge et Marsden (1988) ont montré qu’il n’existe pas en général de
tel schéma d’intégration pour un Hamiltonien non intégrable. Cependant, l’intégrateur
symplectique conserve exactement le Hamiltonien
d’un système perturbé voisin de celui décrit
par le Hamiltonien
initial :
![]() | (2.10) |
où est fonction des dérivés d’ordre
de
(Yoshida, 1990a, 1990b). Par définition, un
intégrateur symplectique est d’ordre
si :
![]() | (2.11) |
Brièvement, nous pouvons diviser les méthodes d’intégration en deux grands groupes (Yoshida, 1993) :
Nous nous sommes intéressés plus particulièrement à un schéma explicite que nous détaillerons un peu plus loin. Tout d’abord, définissons un petit peu la philosophie de construction d’un intégrateur. Elle repose sur cinq points essentiels :
A la suite de Forest (1998, passim), nous considérons que l’application générée par un intégrateur doit toujours être vue comme un nouveau modèle de l’aimant. C’est pourquoi les paramètres linéaires doivent — si besoin — être réajustés afin d’obtenir avec l’intégrateur symplectique une machine dont les nombres d’ondes et paramètres linéaires correspondent à un intégrateur « matrice de transfert-kick ». Nous ne rentrerons pas dans les discussions des partisans de l’ancienne école, qui prétendent que leur méthode d’intégration est plus exacte que celle fondée sur un schéma symplectique. Dans la première, les éléments sont dits épais car représentés matriciellement (de longueur non négligeable), dans la dernière, les éléments sont parfois interprétés comme « coupés en rondelles » suivant un schéma « section droite-lentille mince–section droite » (cf. Peggs et Talman (1986), Schachinger et Talman (1987)).
Nous allons maintenant présenter les deux principales approches rencontrées dans la plupart des codes modernes dans le monde des accélérateurs.
Décomposition en produit d’applications symplectiques : La première approche consiste à écrire le flot hamiltonien sous la forme d’un produit d’applications symplectiques (Dragt et Finn, 1976, Dragt et al., 1988, Dragt, 1996), i.e. sous la forme :
![]() | (2.12) |
où les fonctions sont des polynômes homogènes de degré
déterminées à partir du
Hamiltonien
du système considéré. Le facteur
représente la partie linéaire de la
transformation usuellement écrite par une matrice de transfert
(cf. Eq. 2.1). L’application
décrit les termes nonlinéaires d’ordre deux (et parfois supérieurs) correspondant aux
coefficients
,
, etc. du développement de Taylor 2.1 (Dragt et Forest, 1986 – Dragt et
Abell, 1996 – Dragt, 1996). Le produit d’applications symplectiques 2.12 peut être tronqué sans
aucune difficulté à n’importe quel ordre
:
![]() | (2.13) |
Par construction la troncature est symplectique. Formellement, cette procédure est appliquée pour
chaque élément. Il est aussi possible de calculer l’application de transfert pour l’anneau
complet, on obtient alors l’application de premier retour qu’il suffit d’itérer pour obtenir un logiciel
de tracking symplectique d’ordre
.
Une difficulté pratique apparaît, car l’application de transfert n’est pas intégrable pour
supérieur à 2. Cette difficulté est levée par l’utilisation d’une fonction génératrice
:
![]() | (2.14) |
où est un polynôme à déterminer. On obtient alors la transformation canonique des
variables :
![]() | (2.15) |
Le polynôme est déterminé de manière à ce que les applications 2.13 et 2.15 soient égales
jusqu’à l’ordre
: il s’exprime en fonction des générateurs
(pour plus de détail le lecteur
pourra se rapporter par exemple au guide des méthodes physiques de logiciel MAD [58] ou au
manuel de MARYLIE [29]).
On remarque que la première équation de l’expression 2.15 est implicite en . Elle est résolue
numériquement en utilisant une méthode de Newton. La deuxième équation peut ensuite être
calculée.
Cette approche est suivie, par exemple, par les logiciels MARYLIE [29] et MAD [58]. Une
approche voisine consiste à approximer par des fonctions de Crémona (voir par exemple Dragt
et Abell, 1996).
Intégration directe :
La seconde approche, que nous avons retenue, repose sur l’intégration directe du Hamiltonien
d’un élément de l’anneau. Ce choix se justifie par notre volonté de réaliser un code d’intégration
optimal en termes de vitesse et de précision. Cette méthode est simple à mettre en œuvre et
découple deux problèmes distincts, à savoir la simulation et l’analyse globale de l’anneau. Si le
Hamiltonien est intégrable et si la solution analytique se prête bien au calcul numérique, nous la
conserverons. Dans le cas contraire, nous décomposons le Hamiltonien en deux parties séparément
intégrables, où
peut être vu comme un paramètre de perturbation ; puis nous
utilisons le théorème de Baker-Campbell-Hausdorff (BCH) qui stipule que l’on peut écrire
formellement :
![]() | (2.16) |
avec le Hamiltonien formel :
![]() | (2.17) |
Ainsi l’intégrateur symplectique du premier ordre le plus simple est :
![]() | (2.18) |
Avec l’aide du théorème BCH, des intégrateurs () d’ordre quelconque
peuvent être
construits :
![]() | (2.19) |
où les coefficients sont déterminées pour que le reste soit d’ordre
. En particulier, les
deux relations suivantes doivent être vérifiées :
![]() | (2.20) |
Dans la suite, on se restreint à la classe des intégrateurs symétriques, i.e. .
Par construction ces intégrateurs sont de reste paire
. Le célèbre intégrateur
d’ordre 2 appelé dans la littérature leapfrog integrator (« saute-mouton ») s’écrit (Ruth,
1983) :
![]() | (2.21) |
avec et
.
Une manière simple pour obtenir des intégrateurs d’ordre plus élevé repose sur le travail de Yoshida (1990). L’idée principale est de composer le précédent intégrateur d’ordre 2 pour obtenir un intégrateur symétrique d’ordre plus élevé. Donc, on pourra écrire un intégrateur d’ordre 4 comme :
![]() | (2.22) |
avec pour condition de faire un pas total de longueur et d’annuler le terme d’ordre 2,
soit :
![]() | (2.23) |
De manière générale, Yoshida montre qu’un intégrateur d’ordre peut être construit à
partir d’un intégrateur d’ordre
en utilisant le schéma symplectique :
![]() | (2.24) |
Immédiatement, on obtient : et
.
Les deux intégrateurs les plus fréquemment utilisés en physique des accélérateurs circulaires5 sont :
– l’intégrateur d’ordre 4 () — initialement établi par Ruth (1983, puis reformulé par Forest
et Ruth, 1990) — que l’on peut aussi écrire :
![]() | (2.25) |
avec ,
,
,
et
.
– l’intégrateur d’ordre 6 () (Yoshida, 1990) :
![]() | (2.26) |
avec trois jeux de solutions possibles (cf. Tab. 2.1) et avec toujours un grand pas négatif.
|
La classe d’intégrateurs que nous avons utilisée est présentée dans l’article de Laskar et Robutel (2000) auquel le lecteur pourra se référer pour plus de détails.
Si l’on distingue et
dans l’expression générale du Hamiltonien, les intégrateurs
symétriques peuvent appartenir à l’une des deux classes
et
définies
par :
Jusqu’à présent, nous n’avons pas pris en compte l’existence du petit paramètre . La méthode
retenue consiste à déterminer les coefficients
des intégrateurs 2.27 pour avoir un reste
d’ordre
et non plus d’ordre
.
Par exemple pour un intégrateur de classe (ordre quatre), on a :
![]() | (2.28) |
l’unique solution pour les coefficients est :
![]() |
avec
![]() | (2.29) |
De manière similaire pour un intégrateur de classe ,
![]() | (2.30) |
les coefficients positifs solutions sont l’unique triplet :
![]() |
Ce sont ces deux intégrateurs qui ont été retenus pour l’écriture du code de tracking.
En fait, dans le cas particulier où est quadratique en les impulsions et
ne dépend que des
positions, il est possible d’améliorer encore la méthode en introduisant un correcteur
défini par
(voir Laskar et Robutel, 2000) :
![]() | (2.31) |
où le coefficient du correcteur est déterminé pour annuler le terme d’ordre
(voir par
exemple l’expression 2.29 pour l’intégrateur
). On notera que le correcteur introduit un
pas négatif, mais qu’il est d’autant plus petit que l’ordre de la méthode est élevé (Tab 2.2).
|
Typiquement, le schéma symplectique avec correcteur s’écrit, par exemple pour un intégrateur
:
![]() | (2.32) |
L’intégrateur avec correcteur est encore symétrique et son reste est d’ordre .
Les intégrateurs que j’utiliserai sont d’ordre deux et quatre. Typiquement, un intégrateur
d’ordre 4 sera utilisé pour intégrer les éléments de type dipôles, quadripôles alors qu’un intégrateur
d’ordre suffira pour l’intégration des multipôles individuels.
Nous montrerons qu’un intégrateur d’ordre deux avec correcteur est plus précis d’un ordre de grandeur que l’intégrateur de Ruth (cf. infra). Je vais maintenant présenter le Hamiltonien local pour chacun des principaux éléments magnétiques et les approximations réalisées.
Nous avons vu page §, l’expression la plus générale du Hamiltonien pour un accélérateur (cf.
Eq. 1.35) exprimée en fonction des trois paires de variables canoniques ,
et
. Cette expression dépend explicitement de la longitude
prise comme variable
indépendante.
Dans toute la suite, sauf mention explicite, j’ai choisi de travailler sur la forme quadratique en les impulsions en réalisant un développement limité au premier ordre de la racine carrée. Pour mémoire, je rappelle son expression :
![]() | (2.33) |
La première approximation réalisée a consisté à développer la racine carrée de l’expression 1.35, terme nonlinéaire qui caractérise le fait que les particules sont relativistes. Ce développement permet d’obtenir une expression polynomiale dans les variables accélérateurs. Cette approximation est à la base de nombreux code de tracking. Cependant, il est intéressant de noter que le premier terme négligé est le terme octupolaire,
![]() | (2.34) |
c’est un terme purement cinématique6
qui doit néanmoins être pris en compte comme correction quand l’émittance est grande et lorsque la
fonction de Twiss est importante (voir Papaphilippou et Abell, 2000).
Dans ce cas, il suffira soit d’introduire des termes d’ordre supérieur du développement limité
de la racine carrée, soit de garder la racine carrée. Ce qui a l’inconvénient majeur de
compliquer les calculs ; de plus, un intégrateur du type avec correcteur
ne pourra plus être implémenté, car le correcteur
n’est en général plus
intégrable.
La deuxième approximation fondamentale concerne l’expression générale du champ magnétique (cf. Eq. 1.46 page §) : on suppose que le champ magnétique est constant à l’intérieur d’un élément et nul à l’extérieur, si bien que le Hamiltonien devient autonome pour un élément donné. En réalité, la transition est plus douce. En anglais, on parle d’approximation hard edge, ce qui signifie que les éléments ont un profil magnétique rectangulaire. Cette approximation ne sera plus suffisante pour les machines de faible rayon de courbure. Pour prendre en compte les champs de fuite, une solution simple consiste à compléter la description des éléments ; nous en discuterons plus en détail au moment d’aborder les éléments dipolaires.
Les équations du mouvement sont données par les équations de Hamilton :
![]() | (2.35) |
Etrangement, bien que certains éléments (dipôle, quadripôles) soient complètement intégrables à la suite des deux approximations précédentes, l’intégration est généralement réalisée en utilisant une solution approchée au moyen d’un intégrateur symplectique. Une des raisons est que cette démarche est nécessaire si l’on désire obtenir l’application de premier retour de l’anneau et utiliser des méthodes automatiques d’algèbre différentielle (e.g. le DA-Package appelé plus tard Truncated Power Series Algebra — TPSA — développé en FORTRAN77 par Berz en 1989, voir aussi son livre : Modern Map Methods in Particle Beam Physics, 1999 et plus récemment The Full Polymorphic Package qui est une extension écrite en FORTRAN90 par Forest [47]).
Au cours de ce travail, je n’étais pas intéressé — dans un premier temps — par le calcul de l’application de premier retour (analyse globale de l’anneau), c’est pourquoi je conserve la solution exacte si elle existe — sauf temps prohibitifs de calculs, instabilités numériques, rendant l’intégration symplectique plus efficace — De plus, je reste convaincu qu’il est très souvent plus avantageux en termes de temps de calcul d’écrire un code de tracking construit sur le Hamiltonien local de chacun des éléments (au moins pour les machines à rayonnement synchrotron).
Description et Hamiltonien :
La section droite, drift en anglais, est l’élément le plus simple à modéliser dans un accélérateur,
car c’est un élément sans champ magnétique (). Elle est caractérisée par un seul
paramètre : sa longueur notée
. En coordonnées rectangulaires (
), son Hamiltonien se
réduit à la forme (cf. Eq. 2.33) :
![]() | (2.36) |
Les variables sont cycliques7,
les équations du mouvement sont :
![]() | (2.37) |
Une seule hypothèse de calcul : La linéarité des équations est obtenue par le développement limité du terme cinématique (cf. supra) que j’appelle pour la suite approximation des petits angles.
Intégration des équations : Le système 2.37 est complètement intégrable de solution :
![]() | (2.38) |
où les exposants et
désignent les coordonnées canoniques respectivement à l’entrée et à la
sortie de la section droite de longueur
.
Prise en compte des termes négligés : Si la racine carrée est conservée, les équations du mouvement sont nonlinéaires. Il est néanmoins encore aisé d’intégrer les équations du mouvement en coordonnées rectangulaires ou curvilignes (cf. annexe A.1 et annexe A.3 expression A.36). Il est ainsi possible de vérifier la validité des approximations réalisées.
Un dipôle simple est caractérisé par un rayon de courbure constant et une longueur
; en
moyenne, il courbe la trajectoire d’une particule d’un angle
. Son Hamiltonien s’exprime
naturellement en coordonnées curvilignes en utilisant les équations 2.33 et 1.51 :
![]() | (2.39) |
Par la suite, je ne distinguerai plus le rayon de courbure de l’élément et celui introduit par le
système de coordonnées curvilignes (
). Le terme quadratique en
de l’expression 2.39
traduit une focalisation horizontale purement géométrique du dipôle.
Pour intégrer le Hamiltonien 2.39, je vais me placer dans un cadre un peu plus général. En effet, dans certaines sources de lumière, comme à l’ALS, il existe des dipôles dits combinés, car ils comprennent en plus du terme dipolaire, une composante quadripolaire.
Description et Hamiltonien : Le Hamiltonien d’un dipôle combiné est déduit des équations 2.33, 1.51 et 1.53 :
ℋ(x,y,l,px,py,δ) | = ![]() ![]() ![]() ![]() | ||
= ![]() ![]() ![]() ![]() | (2.40) |
![]() | (2.41) |
On en déduit les équations du mouvement :
![]() | (2.42) |
Hypothèses de calcul : les approximations (a) des grandes machines, (b) des petits angles et (c) hard edge pour le champ magnétique ont été supposées pour exprimer le Hamiltonien du dipôle combiné sous la forme 2.41.
Intégration exacte des équations : Les équations du mouvement 2.42 sont complètement intégrables (cf. équations de deux oscillateurs harmoniques découplés). La solution exacte est donnée en annexe A.2 (p. §) en termes de fonctions trigonométriques circulaires et hyperboliques.
Intégration approchée des équations : Il est également possible d’utiliser un schéma symplectique pour intégrer le Hamiltonien 2.41 que l’on décompose en deux parties séparément intégrables9 :
![]() | (2.43) |
Comme annoncé dans la section précédente, ce découpage du Hamiltonien va nous
permettre d’utiliser un intégrateur de classe ou de classe
. Quelque
soit le type d’intégrateur choisi, il suffit de savoir évaluer les deux opérateurs
et
. En fait le calcul est presque immédiat, dans chacun des cas, il y a au plus un seul
crochet de Poisson à calculer. On obtient les applications respectivement pour
et
:
![]() | (2.44) |
![]() | (2.45) |
Nous avons également vu qu’il est possible d’améliorer l’intégrateur en introduisant un
correcteur (cf. Eq. 2.31). Il suffit de savoir calculer et évaluer le double crochet de Poisson
:
![]() | (2.46) |
avec et
. L’application définie pour le correcteur est alors :
![]() | (2.47) |
avec conformément à l’équation 2.31.
Correction due aux coins de l’aimant :
|
Pour être rigoureux, l’expression du Hamiltonien du dipôle combiné 2.41 décrit un aimant secteur
ou aimant à faces tournées (cf. la définition du bloc courbe page § et le schéma 2.2-a). Souvent, les
aimants d’un accélérateur sont à faces parallèles (e.g. à l’ALS ou Super-ACO), il est donc nécessaire de
corriger les effets de bord introduits par les coins des aimants (cf. Fig. 2.2-b). Au premier ordre, ces
effets se modélisent par un champ quadripolaire focalisant horizontalement et défocalisant
verticalement10.
L’application entre l’entrée et la sortie d’un aimant à faces parallèles est simplement — au premier
ordre — la composition des applications d’un aimant secteur, , et des coins d’entrée,
,
et sortie,
,
(Forest et al., 1994), soit pour un angle d’entrée ou de sortie
de l’aimant
:
![]() | (2.48) |
Notons que cet effet sera prépondérant pour les petites machines, car il est proportionnel à la
courbure .
Pour les machines à faible rayon de courbure comme Super-ACO, un effet supplémentaire est
encore à ajouter dans le modèle : les champs de fuite. Ce phénomène est simplement lié au fait que
le champ magnétique décroît sur les bords de l’aimant et n’est pas tout à fait nul juste à l’extérieur du
dipôle (l’approximation hard-edge doit être complétée). Au premier ordre, les champs de fuite induisent
une composante quadripolaire verticale proportionnelle à la courbure de l’anneau. Le déphasage
vertical11
(
) est donné par la formule (Brown, 1982, pp. 116–117) :
![]() | (2.49) |
avec la distance entre les deux pôles de l’aimant,
la courbure,
l’angle d’entrée (e) ou de
sortie (s) et
, l’intégrale :
![]() | (2.50) |
où est l’amplitude du champs de fuite sur le plan moyen à la longitude
mesurée
depuis l’entrée de l’aimant et
est la valeur asymptotique de
dans l’aimant (cf.
Fig.2.3).
L’application symplectique du premier ordre incluant les coins et le champ de fuite de
l’aimant :
![]() | (2.51) |
Pour un dipôle simple, il suffit de poser dans les formules établies pour le dipôle
combiné.
En annexe A.2, les équations du mouvement sont intégrées pour différentes approximations et
méthodes d’intégration : (a) sans approximations des grandes machines et des petits angles en
géométrie curviligne et rectangulaire et (b) en prenant en compte le terme des petits
machines.
Description et Hamiltonien : Un quadripôle droit est un élément magnétique dont la vocation
est de focaliser la particule qui le traverse ; il a une longueur et un gradient magnétique
; son Hamiltonien s’exprime naturellement en géométrie cartésienne à partir des
expressions 2.33 et 1.53 :
![]() | (2.52) |
Les équations du mouvement du quadripôle sont ( est cyclique) :
![]() | (2.53) |
Hypothèses de calcul : L’expression du Hamiltonien 2.52 est établie dans (a) l’approximation des petits angles et (b) l’approximation hard-edge.
Intégration « exacte » : Les équations du mouvement 2.53 s’intègrent directement pour une
longueur et pour
, on obtient :
![]() | (2.54) |
avec ,
et
Δl = | ![]() ![]() ![]() ![]() | ||
−![]() ![]() ![]() ![]() ![]() ![]() | (2.55) | ||
![]() ![]() ![]() ![]() |
Intégrateur symplectique : Les solutions s’écrivent comme celles du dipôle combiné (cf. Eq. 2.44
à 2.47) en posant une courbure nulle, i.e. .
Description et Hamiltonien : Les hexapôles sont inévitablement introduits pour corriger la
chromaticité. Le Hamiltonien d’un hexapôle de force et de longueur
s’exprime en
utilisant les équations 2.33 et 1.53 en coordonnées rectangulaires par :
![]() | (2.56) |
Les équations du mouvement sont ( est cyclique) :
![]() | (2.57) |
Hypothèses de calcul : L’expression du Hamiltonien 2.56 est établie dans (a) l’approximation des
grandes machines, (b) l’approximation hard-edge.
Le schéma d’intégration que nous allons présenter pour l’hexapôle peut simplement se
généraliser pour modéliser un multipôle droit ou tourné quelconque. Par exemple, un -pôles
droit de force
est modélisable par un Hamiltonien de la forme :
![]() | (2.58) |
Intégration approchée des équations : La partie contient le Hamiltonien d’une
section droite dont la solution a déjà été calculée (cf. Eq. 2.38). Il ne reste plus qu’à intégrer la
partie
contenant le potentiel hexapolaire, on obtient l’application :
![]() | (2.59) |
avec . Usuellement, l’hexapôle est modélisé par une lentille mince de longueur infinitésimale,
e.g.
m. Dans ce cas, il suffira de prendre un intégrateur symplectique d’ordre 2. Si
l’hexapôle est modélisé par une lentille épaisse, un intégrateur d’ordre 4 est utilisé comme pour les
éléments magnétiques précédents.
Un code d’intégration numérique a été écrit en langage FORTRAN90. Ce code prend en
compte l’ensemble des modèles d’éléments magnétiques précédemment présentés. Ce
programme est écrit de manière modulaire afin de pouvoir traiter les petites et grandes
machines ; il est possible d’introduire de nouveaux éléments magnétiques (e.g. les dispositifs
d’insertion) ; le code est dédié et optimisé pour le tracking. Les intégrateurs avec ou sans
correcteur de type et
ont été programmés pour
et
. Des
intégrateurs d’ordre plus élévé pourront sans difficulté être introduits par la suite. Pour
les comparaisons internes, l’intégrateur d’ordre 4 de Forest et Ruth a également été
programmé.
Différents types de comparaisons ont été effectués, en particulier avec les codes DESPOT et MAD respectivement sur une maille de l’ALS (grande machine) et de Super-ACO (petite machine). Les calculs ont été réalisés en double précision sur une station DIGITAL PWS 433 AU (EV56 à 433 MHz).
Précision : Nous avons vérifié la précision de l’intégration pour chaque élément magnétique modélisé. Le Hamiltonien est une intégrale première du mouvement. Nous présentons quelques résultats pour le dipôle combiné dans l’approximation des grandes machines. Son Hamiltonien est rappelé :
![]() |
avec comme courbure , gradient quadripolaire
et longueur
. Le dipôle est ainsi focalisant dans les deux plans.
Tout d’abord, il est nécessaire de remarquer que le Hamiltonien s’apparente à celui de deux
oscillateurs. Les parties et
sont comparables i.e. le petit paramètre
est voisin de
l’unité. Donc pour cet élément, il sera inutile de vouloir utiliser un intégrateur d’ordre
supérieur à 4 puisque la nouvelle classe d’intégrateurs n’a d’intérêt qui si
est un petit
paramètre.
Les erreurs sur l’énergie du dipôle combiné sont calculées sur un temps d’intégration de 1 000
passages à travers l’aimant (Fig. 2.4). Pour l’intégration exacte (cf. annexe A.2.4, page §), l’erreur
est aléatoire avec une dérive numérique linéaire du nombre d’itérations comme attendu (la
précision machine est ).
Les trois schémas symplectiques choisis sont le schéma de Ruth et le schéma et
avec correcteur. Le dipôle de longueur
est intégré en trois étapes d’intégration
(
). La meilleure des méthodes est l’intégrateur
qui est plus d’un ordre de grandeur
plus précis que le schéma de Ruth (Fig. 2.4).
|
|
Une étude systématique de la précision des méthodes a également été réalisée. Les intégrateurs
et
avec correcteur sont comparés à coût constant (i.e. à nombre égal
d’évaluations) avec le schéma de Ruth. L’erreur relative des intégrateurs symplectiques est
présentée pour
en fonction du nombre d’étapes d’intégration pour un aimant de longueur
(Fig. 2.5). En échelle logarithmique, la pente des droites est 4, ce qui correspond à l’ordre des
méthodes utilisées. La méthode
avec correcteur est plus précise que le schéma de Ruth
d’un ordre de grandeur.
Ce résultat va pouvoir être utilisé pour diminuer, à précision constante, le temps d’intégration des élément magnétique, soit de réduire le temps de tracking. Généralement, une à deux étapes d’intégration sont gagnées par comparaison avec l’intégrateur de Forest et Ruth.
|
Un autre point remarquable de cette nouvelle classe d’intégrateurs est sa faible dérive en phase à
nombre égal d’itérations. En comparant la solution numérique obtenue par le schéma symplectique
par rapport à la solution exacte, on note que le déphasage introduit par la méthode est
très faible par rapport à l’intégrateur de Ruth et Forest (voir Fig. 2.6 pour le dipôle
combiné et Fig. 2.7 pour une maille complète de l’ALS). Par exemple, le tableau 2.3
donne le nombre
de tours de l’ALS pour obtenir un déphasage
de
pour
différentes valeurs du nombre d’étapes
d’intégration des dipôles et des quadripôles de
l’anneau12.
Une loi d’échelle entre le temps d’intégration
et le nombre d’étapes
d’intégration
peut être établie. Si
est la longueur de l’élément intégré
fois, et si
est le nombre
d’étapes pour intégrer l’aimant. Alors le pas de l’intégrateur pour chaque étape est
et on
établit :
![]() |
où ,
correspondent au nombre de fois qu’il faut intégrer l’aimant de longueur
,
respectivement en
et
étapes, pour obtenir un déphasage
entre le schéma symplectique (
) et exact (
). En effet, en se souvenant que
la méthode est d’ordre 4 et en ne gardant que les termes de plus bas degré, on peut
écrire :
![]() |
Notons que le déphasage n’est pas une grandeur fondamentale pour déterminer si un intégrateur numérique est meilleur qu’un autre. Nous avons vu précédemment qu’un intégrateur symplectique peut être vu comme un modèle d’un élément magnétique. Ainsi pour retrouver les bons nombres d’ondes, il suffirait d’ajuster les conditions initiales.
|
|
Jusqu’à présent, l’analyse de la précision des méthodes symplectiques n’a pas été
réalisée. Cependant, une remarque concernant la taille des pas d’intégration peut
être faite. Pour cela, décrivons succinctement le schéma d’intégration numérique
d’un élément de longueur avec l’intégrateur
dont l’expression est
rappelée13 :
![]() | (2.60) |
avec et
. Dans ce cas l’intégration est réalisée en deux pas suivant
et un pas
suivant
. Si l’intégration est réalisée en
étapes, le schéma d’intégration 2.60 est composé
fois avec un pas
.
|
Ce processus est illustré pour les intégrateurs et de Forest et Ruth (schéma 2.8 pour
). Pour l’intégrateur
les pas, tous positifs, sont petits, plus fins sur les bords de
l’élément et plus grands en son centre (cf. condition 2.20). L’intégrateur de Forest et Ruth est
caractérisé par la présence de grandes valeurs de pas. Pour intégrer
, on fait deux pas positifs
et deux pas négatifs
; pour intégrer
, deux pas
positifs
et un grand pas négatif
.
La valeur des pas d’intégration a probablement une incidence sur la taille du reste des méthodes symplectiques et donc sur leur précision et phase. Des études plus complètes pourront être entreprises pour préciser ces phénomènes.
Conclusion :
Dans les approximations réalisées, il est nécessaire de trouver un compromis entre la précision et
le temps de calcul. L’utilisateur peut selon les besoins modifier la précision de calcul en jouant sur le
nombre d’étapes d’intégration d’un élément de longueur . La nouvelle classe d’intégrateurs
utilisée permet de d’obtenir un intégrateur plus efficace que le schéma classique de Forest et Ruth à
précision de calcul égale.
Longtemps, le mouvement du Système Solaire a semblé être d’une régularité parfaite. Pour étudier sa dynamique globale, Jacques Laskar a développé l’Analyse en Fréquence qui lui a permis de mettre en évidence du chaos dans le Système Solaire (Laskar, 1988, 1990). Cette méthode numérique utilise une méthode de Fourier raffinée ; elle est adaptée pour l’analyse de la stabilité des orbites d’un système conservatif. Cette méthode a ensuite été appliquée à l’étude da la stabilité de l’obliquité des planètes puis de la Terre (Laskar et Robutel, 1993a et 1993b). Rapidement, elle a été utilisée pour caractériser la dynamique d’autres systèmes : application standard (Laskar, Froeschlé et Celleti, 1992 – Carletti et Laskar, 2000), dynamique galactique (Papaphilippou et Laskar, 1996 et 1998), dynamique des accélérateurs (Dumas et Laskar, 1993 – Laskar et Robin, 1996 – Papaphilippou, 1999).
L’Analyse en Fréquence permet de caractériser finement la dynamique d’un système à degrés
de liberté, est particulièrement adaptée aux systèmes à 3 degrés de liberté. Pour des orbites
régulières, la méthode donne une représentation analytique des solutions alors que pour des orbites
non régulières, elle fournit des critères permettant de caractériser le degré de nonlinéarité du
système.
Pour l’écriture de cette partie, je me suis inspiré des articles de J. Laskar décrivant de manière exhaustive la méthode d’Analyse en Fréquence (1992, 1993, 1994 et 1999).
Pour décrire la méthode d’Analyse en Fréquence, nous allons d’abord nous placer dans le
cas général d’un système Hamiltonien autonome à degrés de liberté écrit sous la
forme :
![]() | (2.61) |
où représente la partie intégrable du mouvement et
un terme de perturbation — dans le
cadre de la dynamique d’un accélérateur, nous avons vu au cours du chapitre 1 (page §) que
décrit le mouvement bétatron et
décrit par exemple les défauts multipolaires
—
Supposons qu’en l’absence de perturbation (), le système puisse s’écrire en variables
actions-angles
. Alors les équations du mouvement se réduisent à :
![]() | (2.62) |
Les solutions 2.62 peuvent s’écrire sous forme complexe , soit :
![]() | (2.63) |
Les orbites 2.63 sont confinées sur des tores de dimensions , produits de cercles de rayons
parcourus aux fréquences
(cf. Fig. 2.9 pour
).
|
S’il existe une bijection entre les actions et les fréquences, i.e. si la condition de non-dégénérescence suivante est vérifiée :
![]() | (2.64) |
alors le mouvement peut être décrit de manière équivalente par les actions ou les fréquences
; on définit alors l’application,
, dite application fréquence :
![]() | (2.65) |
Si de plus, on se place sur une surface d’énergie constante (), alors seulement
actions sont indépendantes et l’application fréquence 2.65 devient (si par exemple,
) :
![]() | (2.66) |
Le problème qui nous préoccupe est de savoir ce qu’il advient de ces orbites sous l’effet d’une
perturbation faible. La réponse est fournie par le théorème KAM (Kolmogorov-Arnold-Moser, voir
par exemple les références incluses in Laskar, 1999) : sous des conditions très générales, pour une
perturbation suffisamment faible, la plupart des tores du système non perturbé () subsistent
mais sont déformés. Ce sont les tores dont les vecteurs fréquences vérifient la condition dite
diophantienne :
![]() | (2.67) |
où est une constante dépendant de
et de
: ils sont appelés tores KAM. Les tores de
pour lesquels
sont appelés tores résonants et sont détruits d’après le théorème
KAM. Entre les tores KAM, les orbites sont en général chaotiques. Cependant, il est encore possible
de construire une application fréquence (voir Laskar, 1999). Les solutions KAM peuvent alors
s’exprimer sous la forme :
![]() | (2.68) |
Les coefficients sont combinaison linéaire de
fréquences indépendantes appelées fréquences
fondamentales du système, i.e.
.
La méthode d’Analyse en Fréquence repose sur la construction de l’application fréquence
numérique, , en recherchant une décomposition quasi-périodique d’une trajectoire sur un temps
d’intégration fini
et en utilisant une technique de Fourier raffinée (Laskar 1988, 1993 et 1999),
i.e. sous la forme d’un nombre fini
de termes :
![]() | (2.69) |
où les coefficients sont ordonnés par amplitude
décroissante14
et
est le vecteur de fréquences fondamentales.
A énergie fixée, une trajectoire de l’espace des phases vit sur une surface d’énergie de
dimension . Habituellement, on observe le mouvement dans une surface de Poincaré,
i.e. que l’on enregistre une trajectoire discrète en fixant un des angles
, par exemple
modulo
(cf. Fig. 2.10). Les fréquences fondamentales déduites du signal
quasi-périodique 2.69 sont exprimées par rapport à la section de Poincaré, donc par exemple dans
notre cas
. Le mouvement est donc restreint sur un espace de dimension
.
|
Pour l’Analyse en Fréquence, une condition plus stricte est adoptée : on fixe les angles
. Dans ce cas, le mouvement est étudié dans un espace de dimension
. Il est
caractérisé par la donnée de
actions.
En ne conservant que les fréquences fondamentales de la décomposition quasi-périodique
(Eq. 2.69) obtenue après intégration sur un intervalle de temps , on construit
l’application fréquence numérique :
Fθ0T : ℝ × ℝn−1 | −→ℝn−1 | ||
(τ,I1,…,In−1) | ![]() | (2.70) |
L’étude des propriétés de l’application va nous donner des informations sur le système
dynamique (résonances, nonlinéarités, chaos).
La diffusion des orbites nous donnera de précieuses informations sur la stabilité globale de la dynamique du système étudié. Pour un système à deux degrés de liberté, l’espace des phases est de dimension 4, les surfaces d’énergie de dimension 3 et l’espace des fréquences de dimension 1 (cf. réduction par la conservation de l’énergie). Une orbite KAM est représentée par un point dans l’espace des fréquences et vit sur un tore de dimension 2. Une orbite non régulière n’est pas un point mais une courbe révélant la diffusion entre les orbites régulières (cf. Fig. 2.11-a). Il est clair que dans l’espace des fréquences, un point (dimension 0) sur une courbe de dimension 1 empêche tout mouvement régulier d’avoir de grandes excursions en amplitude. De manière équivalente, en se plaçant dans l’espace des phases, un tore de dimension 2 sépare une surface d’énergie (dimension 3) en une partie intérieure et une partie extérieure : c’est donc une barrière topologique à la diffusion.
Pour un système à trois degrés de liberté, la situation n’est plus du tout la même. Un point n’arrête pas la diffusion dans un plan (cf. Fig. 2.11-b). Vus dans l’espace des phases, les tores de dimension 3 ne sont plus des frontières topologiques à la diffusion pour une surface d’énergie de dimension 5. Cependant il peut être montré que la diffusion est quasi-nulle au voisinage des orbites régulières. Au voisinage d’une trajectoire KAM, la diffusion décroît exponentiellement si bien qu’un grand nombre de trajectoires régulières joue le rôle de barrière effective à la diffusion (résultat de Morbidelli et Gorgilli, 1995).
|
Avant d’appliquer l’Analyse en Fréquence à l’étude de la dynamique des accélérateurs, deux applications simples vont être présentées succinctement. Le pendule mécanique qui modélise la dynamique au voisinage d’une résonance. Puis, l’application d’Hénon qui est une application nonlinéaire et me permettra d’introduire quelques notions supplémentaires sur l’étude de la dynamique des systèmes.
Le Hamiltonien d’un pendule rigide peut s’écrire sous la forme :
![]() | (2.71) |
où est l’angle de rotation du pendule et
sa dérivée temporelle. Le pendule est un système
dynamique à un degré de liberté complètement intégrable qui permet de modéliser la dynamique
au voisinage d’une résonance (voir par exemple, Chirikov, 1979). Son portrait de phase
est
tracé pour différentes valeurs de l’énergie (Fig. 2.12-a). Deux régimes peuvent être mis en
évidence :
![]() | (2.72) |
![]() | (2.73) |
|
Le pendule admet deux points fixes correspondant aux positions d’équilibre stable et instable :
l’origine est un point fixe elliptique et
est un point fixe
hyperbolique.
La courbe en fréquence est tracée pour
, i.e. passant par le point
hyperbolique et y admet une singularité logarithmique. La période de rotation (Eq. 2.73) est alors
(voir par exemple Tabor, 1988 p. 11 sqq. et Laskar, 1993) :
![]() | (2.74) |
avec , la fonction sinus elliptique de Jacobi :
![]() | (2.75) |
La courbe en fréquence calculée pour
est identiquement nulle pour
, car
la fréquence de circulation est nulle. Par contre au-delà, elle vaut
.
Ces deux courbes sont fondamentales, car elles décrivent le comportement de l’application
fréquence au voisinage d’une résonance (Laskar, 1993). La courbe décrit son comportement
lorsqu’un point hyperbolique est traversé (Fig. 2.12-b), la courbe
lorsqu’une île de
résonance est traversée (Fig. 2.12-c). Si l’on projette la courbe
sur l’axe des fréquences, pour
un échantillonnage uniforme en
, l’allure de la courbe en fréquence ne dépend pas du
choix de
dans le régime libration (cf. courbes 2.12-d et 2.12-e et propriété (1) p. §).
Par contre l’échantillonnage est plus fin au voisinage de île de libration qu’au voisinage
du point hyperbolique, car la variation de la fréquence est plus rapide (cf. singularité
logarithmique).
L’application d’Hénon (Hénon et Heiles, 1964 et Hénon, 1969) est la plus simple des applications non triviales symplectiques polynomiales à deux degrés de liberté (Bazzani et al., p. 77) :
![]() | (2.76) |
où et
sont des variables canoniques et
est le nombre de rotation. Elle dérive du
Hamiltonien dépendant explicitement du temps
:
![]() | (2.77) |
avec la fonction de Dirac
-périodisée.
Malgré sa simplicité, l’application d’Hénon contient une grande partie de la dynamique
nonlinéaire que nous rencontrerons dans les chapitres suivants. La partie quadratique du
Hamiltonien 2.77 modélise le mouvement bétatron perturbé par un hexapôle situé en (cf.
Wiedemann, Tome II ou Lee, 1998). Je ne l’introduis ici que pédagogiquement pour illustrer les
propriétés de l’application fréquence énoncées dans la section 2.2.3 et également pour discuter des
résonances induites par une perturbation de type hexapolaire (pour plus de détails, voir le travail de
Bazzani, Todesco, Turchetti et Servizi, 1994).
Dans ce cas, l’application fréquence est simplement définie par :
FT : ℝ | → ℝ | ||
q | ![]() | (2.78) |
Similairement au cas du pendule, lorsque traverse une île, on observe un plateau, et au
voisinage d’un point hyperbolique une discontinuité de l’application fréquence. L’application
d’Hénon est suffisamment simple pour pouvoir calculer analytiquement la variation de
avec
.
Pour cela, on écrit une forme normale de l’application d’Hénon au voisinage de l’origine qui est un
point fixe elliptique (voir Bazzani et al., 1994). Les largeurs de résonance peuvent aussi être
calculées et dépendent à la fois de
et de
. A l’origine, on retrouve la fréquence linéaire,
i.e.
.
|
|
L’apparition de résonances de tout ordre sous l’action d’une perturbation, me permet d’introduire un résultat général sur la dynamique d’un système Hamiltonien. En effet, d’après le théorème KAM (cf. page §), nous avons vu que la majorité des trajectoires du système linéaire subsistent sous l’effet d’une faible perturbation15. Par contre, tous les tores résonants sont détruits. La condition de résonance pour deux degrés de liberté est :
![]() | (2.79) |
Ces orbites sont -périodiques. Quel est le destin des tores résonants sous l’action d’une
perturbation ? Le théorème des points fixes de Poincaré-Birkhoff (voir par exemple, Arnold et Avez,
1968) stipule que le cercle d’orbites périodiques de fréquence rationnelle
pour le système
non perturbé dégénère en nombre paire (
) points fixes :
points fixes elliptiques alternés
avec
point fixes hyperboliques. Dans chacune des îles, ce schéma peut être appliqué de
nouveau au voisinage des orbites elliptiques (cf. Fig. 2.13).
|
La notion de « dangerosité » d’une résonance pour la dynamique est un problème à part
entière. Par exemple, les résonances et
conduisent toujours à des instabilités
quelque soit l’amplitude d’oscillation initiale
: l’ouverture dynamique est nulle ; pour
, la dynamique est toujours stable : l’ouverture dynamique est infinie. Pour toutes
les autres résonances, il existe une amplitude maximale non nulle (
) au-deçà de
laquelle le mouvement est stable. Au voisinage des points hyperboliques le mouvement est
chaotique mais borné. Par contre aux grandes amplitudes (
), les orbites résonantes
sont suffisamment excitées pour détruire toutes les trajectoires. La dernière trajectoire
fermée16
définit l’ouverture dynamique qui est fortement marquée par les résonances (cf. Fig. 2.14 et
Fig. 2.15).
Ces résultats me permettent de rappeler, qu’un 2n-pôles peut engendrer des résonances de tout
ordre. En effet, il est parfois affirmé, par exemple, que les hexapôles ne peuvent générer que des
résonances d’ordre un et trois. Cette idée fausse provient du fait que si l’on applique une théorie de
perturbation du premier ordre, seules des résonances d’ordre inférieur à apparaissent (voir par
exemple Hagedorn, 1957, Schoch, 1958 ou Guignard 1978) ; de plus, les calculs ne sont en
général pas faits aux ordres supérieurs (voir par exemple, Bazzani et al., 1994, Bengtsson,
1988).
La première application de l’Analyse en Fréquence à l’étude de la dynamique des accélérateurs a été effectuée sur des modèles de l’Advanced Light Source (Dumas et Laskar, 1993, Laskar et Robin, 1996).
Nous avons vu au cours du premier chapitre que la dynamique transverse d’un accélérateur est
modélisée par un système à (2+1) degrés de liberté, où le troisième degré de liberté provient de la
dépendance en longitude du Hamiltonien global.
L’Analyse en Fréquence se trouve être un outil particulièrement adapté à l’étude d’un tel
système. En effet, en adoptant les positions et moments canoniques usuelles, ,
deux des conditions initiales peuvent être fixées, par exemple les moments
, pour un
jeu de conditions initiales
, la trajectoire de phase est intégrée numériquement et l’on
enregistre la trajectoire phase discrète
sur une section de Poincaré
pour une longitude
donnée, typiquement
à chaque tour
pendant un temps
d’intégration
(Fig. 2.16). L’approximation quasi-périodique du signal
est
recherchée sous la forme (cf. page §) :
![]() | (2.80) |
avec (resp.
),
le vecteur de fréquences fondamentales
qui correspond aux deux nombres d’ondes et à la fréquence de premier retour sur la surface de
Poincaré ;
un multi-indice et
.
|
L’application fréquence est alors de dimension deux :
Nous allons décrire la construction de la carte en fréquence de l’Advanced Light Source, carte qui a la particularité d’être très simple à lire.
Pour chacune des conditions initiales , la trajectoire de la particule est intégrée
numériquement sur
1 000 tours consécutifs. Ce nombre de tours est justifié par le temps
d’amortissement qui, pour l’ALS, est dix fois supérieur.
Si la particule a survécu (i.e. sa trajectoire n’a pas divergé), ses conditions initiales
appartiennent à l’ouverture dynamique. Les 1 000 premiers tours de l’intégration sont
utilisés pour calculer avec l’Analyse en Fréquence les nombres d’ondes
. On
a ainsi obtenu le premier point de l’ouverture dynamique de l’ALS et de sa carte en
fréquence.
Les 1 000 tours suivants servent à calculer de nouveau les nombres d’ondes . Si
l’orbite n’est pas régulière les deux jeux de fréquences vont différer, car l’orbite aura diffusé. On
définit alors un indice de stabilité
:
![]() | (2.82) |
La diffusion sera codée par des niveaux de gris ou des couleurs (Annexe B) à la fois sur la carte en fréquence et sur l’ouverture dynamique. Cet indice se révèle être un excellent critère de stabilité à long terme (voir le travail de Dumas et Laskar, 1993).
Ce processus de construction est réitéré pour chaque point de la grille de conditions initiales.
Puisque la première contribution au glissement des nombres d’ondes est quadratique,
(cf. Eq. 1.76 page §), le choix le plus judicieux comme pas d’incrémentation des
conditions initiales est un pas suivant une loi en racine carrée (i.e. à choisir l’action). Ce qui nous
permet d’obtenir une détermination plus grossière de l’ouverture dynamique au voisinage du point
de fonctionnement mais beaucoup plus fine sur les bords de l’ouverture dynamique, i.e. là où
précisément les résonances limitent la stabilité du faisceau.
La carte en fréquence et l’ouverture dynamique de l’ALS sont données par la figure 2.17.
Le point de fonctionnement est le coin supérieur droit de la
carte. Le bord supérieur (respectivement inférieur) de la carte correspond à la variation
des nombres d’ondes avec l’amplitude pour
à
(respectivement
à
).
Trois types de zones peuvent être distinguées sur la carte en fréquence (Fig. 2.17) :
|
Nous obtenons une bijection entre l’espace des configurations et l’espace des fréquences. Les résonances peuvent être directement localisées sur l’ouverture dynamique. Dans cet espace (Fig. 2.17-b), les régions complètement instables correspondent à celles sans points ; les résonances ne sont pas des droites mais des « courbes » dont l’épaisseur est proportionnelle à la largeur de la résonance.